Cinoche
L’aube est pâle et jaune. Des hyènes ricanent sur ton passage. Impossible de savoir, ce que tu fous dans ce no man land. Ta vue se brouille. Il semble que tu vacilles. Tu tentes de réanimer ton portable, dans un improbable bouche-à-bouche. Des silhouettes s’animent, autour de toi. Tu trébuches contre un objet non identifié. Des mains t’aident à te relever. Tu entends une musique, dans le lointain. Et la sirène d’une ambulance. Toujours la même saloperie de film, qui se bouscule au ralenti, dans ta tronche imbibée. Tu reviens à cette scène du crime primitive ; cri interminable, qui semble se figer à jamais. Les mouvements intérieurs sont contradictoires, en des distorsions assumées, qui se projettent sur ton passé. L’ampli résonne dans ton cerveau anesthésié, où tu croises des amazones, perdues dans l’éther de tes pensées. La cavalcade n’est que de circonstance. Tu continues à tirer sur ton mégot, dans une effusion de volutes. Les sentinelles se rapprochent, et forment un cercle autour de toi. Cette scène, tu l’as déjà vu au cinéma, ou du moins dans ton cinoche intime. Et tu ressens l’inquiétude, qui monte, comme si tu étais pris dans un piège. Épris dans un piège. Le cristal vole, et se brise sur le parquet en flamme.
Stéphane Vallet
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