L'océan vacille
Dans une dramaturgie de crise, chaque coup est permis ; il faut s'enfoncer dans la chair, pénétrer les entrailles, et canaliser les courants de laves qui se déversent, un peu partout. Sans vision, impossible de définir une stratégie. Les simagrées de principe ne font rire personne. Chacun refile sa camelote aux zombies de passage. Il suffirait d'une étincelle, pour que tout crame. Depuis longtemps, tu pressens le naufrage. Les réalités se superposent, dans un vertige incessant. Tu es dans le monde, et en dehors du monde, exilé dans ta stratosphère, avachi devant un écran, et tu peines à garder le contrôle de ton territoire, surveillé, de part et d'autre, par de patibulaires robots, qui décryptent en temps réel chaque souffle de ton corps. Certains mots se négocient sous le manteau, mais il n'est pas nécessaire d'apporter d'invitations pour participer aux partouzes verbales. Il suffit d'être prêt à en payer le prix du sang, toujours en espèces. Tu observes avec inquiétude le regard des inquisiteurs. Ils se rapprochent dangereusement de ton espace intermédiaire, et cherchent à canaliser ce qu'il te reste d'énergie. Ils rôdent autour du labyrinthe, comme les insectes dans ton crâne. Chaque souffle de vent te rassure. Tu cherches à rejoindre une base arrière, par les souterrains de ta pensée, dans une fuite éperdue. Il suffit de fermer les yeux. L'océan vacille et tu glisses sur la neige.
Stéphane Vallet
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