Vibrations animales
Tu repenses aux cérémonies cannibales, aux bougies dans l'arène, aux combats à mort des derniers gladiateurs. Des miliciens du langage surveillent le flux incessant de messages codés. Chaque mot est un piège à détonation lente, impossible à désamorcer. Des relents pathogènes flottent dans l'azur décervelé où s'agitent des oiseaux de malheur. Les cris des évaporés retentissent, un peu partout, comme des défis à l'obscurité. Pas une étoile à l'horizon. Juste ce vent dans ton crâne. Dans les méandres de ton esprit, nimbé de vagues ivresse, se tissent des toiles indéchiffrables, que tu perpétues à entremêler, au risque de perdre pieds, dans des sursauts imaginaires. Tu n'aboie plus depuis longtemps, préférant l'esquive à l'attaque frontale, et tu t’accommodes de virtualités de façade, comme un torero avec sa cape rouge. Tu te souviens de langues vivantes, de corps électrisés, et de râles suspendus à la nuit. Tu te souviens de la saveur des peaux. Tu te souviens de serments balayés. Et le vent souffle dans ton crane, comme il souffle sur le monde, dans un effroi généralisé. Tu n'échappes pas aux vibrations animales. La rapacité de tes contemporains ravive des blessures oubliées. Il faut un moral de tueur en série pour engraisser dans l'aquarium.
Stéphane Vallet
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