Louis Calaferte (1928-1994) a écrit de lui : "Le jeune écrivain John Taylor - talent, intelligence et culture. Il est de ceux (rarissimes) qui ont le sens de la gravité. Une dimension." (1) Né en 1952, à Des Moines (États-Unis), John Taylor vit en France depuis 1977. Avec "Une certaine joie", recueil de courtes proses, cinquième livre publié en français, il démontre ce sens de la gravité, et donne une dimension à la banalité du quotidien. Le narrateur, piéton mélancolique, erre dans une ville où il ne se passe rien. Il se laisse guider par ce qu'il imagine, dans un territoire où signes de vie semblent toujours s'échapper : "Comme d'habitude, je suis à la recherche de curiosité. Ou de choses banales ? Ou de tout ce qui peut se trouver entre les deux ?"
Ce qu'il poursuit, c'est lui même, et la fuite du temps. Dans un dédales de rues, d'avenues, de boulevards, d'impasses, de ponts, aux noms toujours minutieusement notés, il invente les règles d'un jeu d'enfance. Cette ville française, qu'il décrit, dont il décrypte les sens cachés, n'est qu'un prétexte à une mise en abime de son âme. La puissance poétique de l'imagination est le moteur de cette traversée. Une écriture en marche, en mouvement : "(...) je sens monter en moi un sourd désespoir, comme si j'étais parti pour un grand voyage, loin de mon pays, à pied, emportant avec moi mon vieux luth cassé en caressant l'espoir de le faire réparer et de pouvoir ainsi prendre un nouveau départ dans la vie, et qu'il me faille admettre à présent que cela est chose impossible."
De ses déambulations méditatives, liées entre elles par un fil secret, John Taylor donne à chaque mot, un éclat et un relief particulier. Touches légères d'humour teintées d'amertume. Fragments philosophiques, poésie pure. "Une certaine joie" est un livre singulier, et fort. De ceux qui vous traverse, et chemine longtemps en vous.
S.V.
John Taylor, Une certaine joie, traduit de l'anglais (États-Unis) par Françoise Daviet, Tarabuste Editeur (Collection In-Stance), 2009.
(1) in Dimensions : Carnets XV : 1993, Louis Calaferte, Gallimard/ L'Arpenteur, 2009.
Je suis bien content d'avoir des nouvelles de John T. Je me souviens bien de lui. Très sympathique. Athlétique. Parlant très bien français. Amoureux de la littérature.
Rédigé par : Morlino | 28/01/2010 à 21:55